Présidé par Jean François Corté, secrétaire général de l’association mondiale de la route (AIPCR), le premier congrès mondial pour la préservation, l’entretien et le recyclage des patrimoines routiers (PPRS) qui s’est tenu à Paris du 22 au 25 février dernier avait pour objectif de mobiliser la communauté internationale pour rappeler le rôle majeur joué par les infrastructures routières dont l’entretien représente un coût d’autant moins onéreux qu’il est intégré à une stratégie raisonnée, pluriannuelle, d’investissements. Il a permis de rassembler plus de 800 experts du monde entier provenant de près de 80 pays.
L’affluence dans les salles de conférence et les allées du salon associé a témoigné du succès de ce congrès, dont la qualité des conférences, au cours de ces trois jours, a également été saluée par les congressistes. De nombreuses sessions techniques ont permis d’échanger sur les thèmes du recyclage, des matériaux, des nouveaux procédés, de l’auscultation mécanique et automatisée des couches de chaussées, et les résultats de ces échanges seront porteurs de progrès.
Mais ce succès est aussi et surtout dû au malaise actuel qui prévaut parmi les acteurs des transports, face à l’écart considérable qui sépare le caractère crucial de ces sujets, notamment au regard du développement économique des pays mais pas seulement, de la façon dont les décideurs politiques s’en emparent aujourd’hui pour les intégrer dans leurs objectifs d’actions prioritaires.
Les réseaux d’infrastructures routières, un patrimoine d’importance majeure mais fragile
En effet, plusieurs communications ont mis en exergue, de façon similaire dans chaque coin de la planète, le rôle prépondérant des infrastructures de transport dans l’économie des nations, leur valeur patrimoniale exceptionnelle se chiffrant en milliers de milliards d’euros, et la nécessité de maintenir en état ce patrimoine, particulièrement celui des ouvrages d’art, partout vieillissant mais ô combien stratégique. Mais les voix de l’Allemagne, du Royaume-Uni, de l’Australie, des pays africains, du Brésil, du Mexique, de l’Europe et notamment de la France, ont chacune à leur tour souligné la difficulté croissante à trouver les financements pour ces travaux d’intérêt public.
Bien sûr, la crise des finances publiques dans les pays développés, particulièrement en Europe, et le manque de ressources des pays en développement sont à l’origine de ces difficultés. Toutefois, celles-ci relèvent aussi du manque d’intérêt porté par le politique à ces sujets, en comparaison aux problématiques liées à l’énergie, à la santé, au dérèglement climatique, et bien sûr aux tensions géopolitiques émergeant dans le monde.
Un Livre blanc pour contribuer à la mobilisation des acteurs publics et privés responsables de la gestion des réseaux routiers
Dans ces conditions, que faire ? Comment attirer l’attention de ces pouvoirs publics qui, au plus haut niveau, semblent se désintéresser de la question générale des transports, qu’il s’agisse des biens ou des personnes, en oubliant parfois qu’elle est fondamentalement liée et pour toujours à l’infrastructure, support de la mobilité.
Des éléments d’aide à la compréhension de ces sujets, et à la décision ont été apportés lors d’une conférence donnée par l’Institut des routes, des rues et des infrastructures pour la mobilité (IDRRIM) qui a publié, dans le cadre d’une étude plus générale sur la gestion et l’entretien des patrimoines urbains et routiers (GEPUR), un livre blanc intitulé « Entretenir et préserver les patrimoines d’infrastructures de transport : une exigence pour la France » avant tout destiné aux décideurs politiques. Ce document porte à leur connaissance l’ensemble des enjeux économiques et techniques qui sous-tendent la décision politique afin que les arbitrages budgétaires en matière d’infrastructures routières puissent être pris en connaissance de tous les paramètres propres à assurer une prise de décision responsable.
Sensibiliser l’usager, le citoyen, et le contribuable
L’autre voie vers la prise de conscience de nos décideurs a été très justement développée lors de la conférence « Communication pour une nouvelle vision de la route » à laquelle participait l’IDRRIM. Tous les intervenants ont convenu, à juste titre, que la communication autour de la route devra nécessairement cibler l’usager, le citoyen, dont le rôle est désormais crucial avec le développement d’Internet, des réseaux sociaux, et des applications numériques.
L’avenir ne se construira donc pas sans un citoyen collaboratif, acteur de sa propre destinée et l’usager, contribuable et électeur, est un allié de poids. Le convaincre de la nécessité de maintenir le patrimoine public d’infrastructures pour garantir sa sécurité et son droit à la mobilité, c’est persuader nos politiques de l’utilité et du bien-fondé des projets d’infrastructures.
Alors les arbitrages pourront être opérés de façon différente afin que les déplacements des biens et des personnes, que chacun désire les plus sûrs, les moins coûteux et les plus performants aujourd’hui, soient traités avec l’attention qu’ils méritent.