Les rencontres de TDIE, bien dans leur mission, présentent une problématique et s’emploient à promouvoir une solution. Tout autre é était l’ambition audacieuse de Mobilettre, cet organe de presse encore jeune qui s’est spécialisé sur l’enjeu qui nous rassemble : la mobilité .Un journal professionnel aussi peut proclamer sa liberté, par son ton, souvent, par un questionnement insolite, cette fois-ci : J’aime l’Etat ? Les voutes défraichies, mais de belles proportions, du couvent des Récollets lieu des débats, donnaient le ton : l’Etat chef d’œuvre en péril ?
Description cinglante de dysfonctionnements publics par de bons connaisseurs, l’ancien ministre Fréderic Cuvillier et un parlementaire pointu sur le sujet des transports, Gilles Savary. Le mépris de la loi portant Ecotaxe surplombait le débat .
Puis le rôle de l’Etat actionnaire fut pesé : passable, voire assez bien. Le sens de la durée, la capacité à suppléer au marché quand l’indépendance industrielle de la France est en cause, une mise en ordre par l’APE de la gouvernance : libre de ton comme sait l’être un retraité Louis Gallois a récusé la critique facile de l’Etat actionnaire.
L’Etat régulateur ? Michel Boyon conclut le colloque par un heureux rappel sémantique : en français le mot anglais « régulation »doit d’abord se traduire par « réglementation » et là le pouvoir, régalien, est dans son rôle, sous réserve de sa cohérence.
Mais il y a tout autre chose dans le néologisme français « régulateur », l’idée, plus proche du libéralisme écossais que de nos Lumiéres, est que pour que les marchés fonctionnent, une intervention extérieure censée représenter expertise et bien commun s’impose, afin que les dynamiques individuelles ne bloquent pas un système. Conception a minima du rôle de l’état qui ne privilégie pas l’action, et suppose une claire vision de la hiérarchie des critères.
Et c’est là que la multiplicité des domaines d’intervention, indirecte, rend difficile la lecture du rôle de l’Etat et qu’un détour s’impose.
Rappel des contraintes d’abord, et la parole de la philosophe Cynthia Fleury permet d’en rappeler la prégnance : contradiction entre l’immédiateté politique, cette émotion dans l’info en continu soulignée par Thierry Pech, et le temps long de l’action, dans nos domaines tout particulièrement.
Rappel de l’adéquation du territoire à l’action : les limites de toute vision fractale de la décentralisation, par laquelle chaque niveau recentraliserait, au bénéfice d’une recherche des territoires d’action pertinents. Rappel plus général, avec humour, par Sophie Mougard , du lien qui se crée toujours entre un objectif, une posture, et un outil spécifique : mais où donc s’exprime et en quel nom ce Commissaire du Gouvernement, (quel titre !) cet arbitre que les intervenants ont paradoxalement décrit comme discret, voire absent.
Sophie Boissard nous a rassurés, « Oui elle aime l’Etat »et nous ne demandons qu’à la suivre, mais un tri drastique s’impose entre objectifs, entre domaines d’intervention, tri préalable à l’élaboration d’une vision qui justifiera les choix que suppose toute action. Jean Paul Delevoye nous a rappelé que si l’état allemand tient par le process, l’état britannique par la création de valeur pour le contribuable, l’Etat, en France tient sa légitimité de sa créativité. A bon entendeur…